Rencontres Silicon Valois : Enjeux des moteurs de recherche

le 28 Mai 2014
6 min de lecture
Rencontres Silicon Valois : Enjeux des moteurs de recherche

Cette semaine s’achèvent les rencontres Silicon Valois qu’a accueilli le Ministère de la Culture et de la Communication. Cette expérimentation faite de rencontres, tables-rondes et débats a permis une série de réflexion autour du secteur du numérique. Mais Silicon Valois a également été du 15 au 28 mai 2014 un espace de coworking ouvert. Le nom est un clin d’œil sans prétention à la Silicon Valley en faisant référence à la rue de Valois qui borde les bâtiments du Ministère de la Culture et de la Communication.

Parmi ces rendez-vous, nous avons assisté à la rencontre moteurs de recherche, enjeux & alternatives qui a eu lieu le 26 mai.

Les intervenants étaients :

  • André Meillassoux, Président de l’AFDIT (Association Française du Droit de l’Information et de la Télécommunication),
  • Claire Bernier, Secrétaire Général de l’AFDIT et juriste spécialisée dans le droit numérique,
  • Sophie Nerbonne, Directrice adjointe, Direction des affaires juridiques, internationales et expertise de la CNIL,
  • Luc Ribiello, fondateur de Innooo.fr qui se veut être une alternative made in France aux géants de la recherche.

André Meillassoux introduit le débat en lançant une question qu’on se pose de plus en plus dans nos métiers : Google, qui aurait plus d’informations sur nous que l’INSEE, représente 96 % des recherche en France, est-ce un problème ?

Google est-il éditeur ou hébergeur ?

Une longue et très intéressante intervention de Claire Bernier revient sur l’évolution du statut juridique de Google. En effet, une succession de jurisprudences depuis les années 2000 ont interrogé le moteur sur son caractère d’éditeur ou d’hébergeur.

On identifie alors deux responsabilités possibles.

La responsabilité de l’éditeur : Selon la loi de 1981, l’éditeur est responsable de ses publications. Il doit par ailleurs être titulaire des droits ou avoir eu l’autorisation des titulaires des droits des contenus qui sont mis en ligne.

La responsabilité de l’hébergeur : S’il y a faute, la faute de l’hébergeur est d’avoir failli à son rôle d’hébergeur. Sous réserve que l’hébergeur n’a pas eu connaissance avant mise en ligne d’un contenu répréhensible en donnant à disposition un lien vers ce contenu, l’hébergeur n’est pas responsable. La responsabilité de l’hébergeur intervient dès lors qu’il est mis au courant du contenu en ligne et qu’il n’a rien fait.

En ce sens la réponse de Google est qu’il enlèvera des liens à condition qu’on lui propose de manière incontestable que les contenus sont répréhensibles. Dans le cadre de la gestion des données personnelles (difammation, calomnie, injure), la position du géant américain encourage les personnes demandeurs de suppression de liens, donc d’une desindexation de contenu des résultats du moteurs, à aller vers les tribunaux.

Google condamné dans les années 2000 pour contrefaçon de marque et publicité mensongère

Parallèlement s’est posée la question de l’influence de Google dans l’économie. En effet, le classement des résultats de recherche a un impact considérable sur la visibilité d’une entreprise et donc sur son activité.

2003, 2006, 2009 Google est condamné pour contrefaçon de marque, contrefaçon et publicité mensongère. Le responsable pointé du doigt est Adwords qui permet d’acheter la marque d’un concurrent pour apparaître dans les résultats publicitaires. Mais de la même manière, remonter dans les résutlats organic au-dessus d’un concurrent sur une requête marque est une forme de contrefaçon et donc de publicité mensongère.

Selon l’article du code civil 1382 : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.  »

En conséquence, Google n’a pas mis en place à ce moment de services qui permettent de contrôler l’usage de sa marque dans le système d’achat de mots-clés que nous appelons également dans nos métiers le brand squatting, alors il est responsable.

Prise de position de la Cour de Justice de l’Union Européenne

Claire Bernier continue son historique et nous interpelle sur l’intervention de la Cour de Justice de l’Union Européenne. Cette dernière définit Google comme étant un hébergeur et un prestataire technique. « On doit donc lui apposer la responsabilité de l’hébergeur [cité au début de ce billet, NDLR], sauf s’il a eu un rôle actif dans la commission de l’infraction et du dommage ».

Cela signifie que tant que Google n’est qu’un hébergeur et fournisseur de résultats de recherche, alors il n’est pas responsable des contrefaçons de marques, calomnies, diffamations, injures, etc. Nous nous posons donc naturellement la question du Knowledge Graph, des résultats enrichis, des blocs vidéos, blocs météo et de tout ce que fournit Google en dehors de l’index des résultats naturels et publicitaires Adwords.

De la même manière, en 2014 une jurisprudence dit que Google n’est pas condamnable de fournir un lien vers un contenu répréhensible en tant que prestataire technique. Mais le Tribunal de Commerce de Paris annonce la même année qu’il doit supprimer un contenu, si on lui fait part de son caractère répréhensible.

La responsabilité de Google dans l’indexation des données personnelles


La réputation numérique d’une personne peut se jouer à peu de choses. Il suffit que quelqu’un mette en ligne un propos injurieux et le diffuse pour que cela apparaisse dans les résultats des moteurs quand on recherche son nom.

Sophie Nerbonne, Directrice adjointe de la CNIL nous explique que Google est responsable du traitement des données à caractère personnel. Il définit les finalités et les moyens du traitement et en tant qu’acteur dans leur classement et indexation automatique, il est responsable au sens de la directive de la protection des données.

Voici les critères de responsabilité pris en compte :

  • Protection des données personnelles
  • Finalité de la collecte de données
  • Pertinence et adéquation des données collectées
  • Durée de conservation par rapport à la finalité initiale
  • Mesure de sécurité pour éviter la transmission à des tiers non autorisés à avoir ces informations
  • Respect du droit des personnes

Lors de la mise en œuvre de plaintes auprès de Google pour la mise en ligne de contenus personnels, il se pose la question de l’installation de ce type de grandes entreprises dans d’autres pays (Irlande ou Luxembourg par exemple). Or une entreprise doit traiter de ces sujets avec l’autorité nationale.  Dans ce cas on estime que Google ayant des filiales nationales qui participent à la rentabilisation des résultats naturels, alors sa filiale nationale est responsable des résultats naturels, même si les datas center sont dans un autre pays.

Il faut accompagner les acteurs du numérique

La position de la CNIL et de l’AFDIT va dans le sens de la prévention et de l’accompagnement. Loin de vouloir sanctionner à tout-va les acteurs du numérique que ce soit Google ou d’autres entreprises, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés meut ses structures pour s’adapter aux changements du secteur.

De notre point de vue, un accompagnement devra également être réalisé auprès des éditeurs de contenus afin qu’ils prennent connaissance de ce qu’ils sont en mesure de réaliser pour protéger leurs marques (pour une entreprise ou une personne) et leurs données.

Les questions du droit à l’oubli ou de la portabilité des données sont loin d’être résolues. Cependant nous voyons que les successions de jurisprudence font avancer les choses.

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